L’illusion de la Qualite

Les entreprises adoptent une demarche qualite et se font certifier, mais ca ne veut pas dire qu’elles delivrent des produits de qualite, et au meilleur prix.

L’Assurance Qualite est une notion utile a l’indutrie

L’industrie s’est appropriee le concept de qualite et l’a redefini ; pour simplifier, la certification indique que l’entreprise maitrise sa production et elle est donc capable de garantir que ce qu’elle delivre est conforme aux specifications de maniere continue.

L’Assurance Qualite est une demarche utile a l’industrie : ca permet aux franchises telles que McDonalds de faire en sorte que l’experience du client soit la meme partout dans le monde.
Ca permet aussi aux entreprises de faire confiance a un nouveau fournisseur, qu’il soit situe en France ou a l’etranger. Evidemment, ca ne resoud pas tout, mais ca aide a etablir les relations entre clients et fournisseurs.

Qualite n’est pas synonyme de productivite

Pour atteindre cet objectif de qualite, tout est une affaire de procedures et de controles. En regle generale, tous les documents doivent etre stockes, notamment ceux qui materialisent les decisions ou validations.
Ajouter a cela le principe d’amelioration continue qui exige un processus d’analyse des problemes, et vous comprenez rapidement que la demarche qualite demande un investissement important de la part de l’entreprise.
Autant cela a du sens dans une grande entreprise qui souhaite uniformiser ses pratiques, autant ca peut totalement handicaper une petite societe dont les atouts sont generalement la rapidite et la flexibilite : imaginez qu’il faille faire une reunion et reecrire les procedures a chaque fois qu’un client demande de travailler differemment !
Dans tous les cas, qui dit Qualite dit « controle de la qualite » et donc controleur qu’il faut embaucher, et donc la demarche qualite a un cout.


Mau Russo (c) Flickr

La Qualite est une approche systématique et non pragmatique

Les controles ne s’effectuent pas sur 100% des produits, mais sur une selection d’echantillons, ou en analysant des moyennes.
Quand le controle porte sur de centaines ou des milliers de produits, un taux d’erreur est accepte. La demarche qualite exige que ce taux d’erreur soit constamment ameliore, mais aucune valeur minimale n’est requise pour etre certifie (dans certains cas la loi fixe des valeurs minimales, notamment pour l’agro-alimentaire, mais pas les organismes de certification de la qualite).
Le but n’est donc pas d’avoir le meilleur resultat a chaque fois, mais d’avoir un resultat moyen qui satifasse aux controles.
Et un resultat moyen n’est pas loin d’un resultat mediocre.

Le piege des procedures

Le probleme avec les procedures, c’est le risque de croire qu’elles sont plus importantes que le resultat. Il n’y a qu’a voir l’administration publique pour comprendre le probleme !
Avec les procedures, on augmente le risque pour un utilisateur de s’entendre dire : « Desole, vous n’etes pas content, mais tout a ete fait dans les regles donc il n’y a pas de probleme ».
Ce sont les procedures qui obligent les entreprises a faire signer des formulaires pour tout et n’importe quoi, et a conserver des tonnes de papier pendant des annees…
Etonnament, la demarche qualite risque de diminuer la satisfaction du client !

La qualite au sens populaire

Le pire dans tout ca, c’est qu’a aucun moment l’assurance qualite ne donne l’assurance d’avoir un produit de qualite. Simplement d’avoir un produit donc la qualite a ete controlee et maitrisee.
A titre d’exemple, ca ne veut pas dire que la tarte surgelee a ete faite avec des bons ingredients, ni meme qu’elle aura bon gout !
L’Assurance Qualite a ete inventee par les technocrates qui souhaitent pouvoir tout mesurer – et la vraie qualite (« c’est bon / c’est pas bon ») est impossible a mesurer de maniere objective et constante dans le temps.
Donc la notion de qualite a ete transformee pour repondre a ces besoins de mesure et de controle – mais l’utilisateur final, le client qui achete la tarte surgelee, n’a pas forcement conscience que la notion de qualite a ete biaisee.

Le guide Michelin

Heureusement, il existe encore des defenseurs de la « vraie » qualite, et un bon exemple est le guide Michelin : un gouteur qualifie, a l’experience reconnue, selectionne par un organisme independant, est envoye dans les restaurants pour y manger comme n’importe quel client.
Et le critique se fiche de savoir quelles procedures sont utilisee en cuisine : est-ce que la commande est approuvee par le Maitre d’Hotel avant de partir en cuisine ? Est-ce que l’orthographe du livre de recette a ete verifiee ? Il s’en fiche ! Tout ce qui compte c’est le resultat.
Et ca marche car pour atteindre le meilleur resultat, il faut utiliser les meilleurs ingredients et qu’il faut utiliser les meilleures recettes.
Evidemment, il y a des choses qui doivent etre faites dans un certain ordre : le sommelier vient apres le serveur, la carte des desserts apres le plat principal, etc. Mais le critique ne s’interesse pas a ce qui se passe derriere la scene et evalue uniquement le resultat final qui s’offre a lui.
Et a la fin du repas il donne une note : 1, 2 ou 3 etoiles. Ou aucune.
Totalement le contraire de l’assurance qualite !

Martin Vidberg (c) monde.fr

Google et l’anti-qualite

Etonamment, le moteur de recherche Google s’appuie sur une approche similaire a celle du guide Michelin : quand il indexe les pages du web, Google ne se preoccupe pas de savoir qui les a ecrites, dans quelles conditions, ni meme si les informations sont veridiques !
Google assigne une note a chaque page, le « pagerank », et plus cette note est elevee, plus elle apparaitra en haut de la page des resultats de recherche.
Et un facteur decisif de cette note est le nombre de sites qui ont des liens vers la page analysee : plus il y a de liens vers cette page web, plus son « pagerank » sera eleve. En d’autres termes : plus il y a de personnes qui recommandent une page, plus Google estime qu’il s’agit d’un contenu de qualite.
Et si les pages qui offrent ces liens ont elles-memes un « pagerank » eleve (ce qui fait d’eux des « experts » dans leur domaine), alors ca augmente la note de la page vers laquelle elles pointent. Un peu comme le critique gastronomique qui recommande un restaurant : ca augmente forcement sa credibilite.
Et c’est ainsi que Google evalue (ou évaluait) s’il s’agit d’un contenu de qualite. Surtout s’il est mis a jour regulierement.

Andréia (c) Flickr

Le futur de la qualite

Le systeme d’assurance qualite a du bon pour nous, les informaticiens : les entreprises ont besoins d’embaucher des controleurs, ont besoins de logiciels de workflow (qui force le respect des etapes d’une procedure) et d’outils pour stocker et consolider les resultats de ces controles. Donc ca nous cree du boulot !
Mais plaisanterie mise a part, tout ca a un cout pour l’entreprise, d’autant que ca ne garantit rien du tout pour l’utilisateur final.
Il me parait donc necessaire d’utiliser une nouvelle demarche de qualite, qui permette aux entreprises d’evaluer et de certifier la qualite de leur produit en s’appuyant sur la satisfaction des utilisateurs – et pas seulement la rigueur de leurs procedures !
De tels systemes existent ; les marques s’appuient largement sur la reconnaissance de leur nom, et il est courant pour en entreprise de se prevaloir des references de leurs clients. Il y a aussi les « produits de l’annee » – mais franchement, comment faire confiance a un panel d’utilisateur qui doit choisir si le produit de l’annee est le bifidus a la fraise ou le flan au caramel ?
Le probleme est qu’il n’y a pas de standard auquel on peut se referer en toute confiance, notamment dans le monde des services IT, et pour le moment le bouche a oreille est sans doute la meilleure solution pour trouver des produits/services de qualite !


flibble (c) Flickr


[NdR : ce billet est garantie 100% sans accents car écrit par Roland à dos de dromadaire en Australie sur un Netbook, alors les accents, hein…]

Roland

Actuellement IT Services Manager (France) au sein de la société Wolseley. Diplômé du Master MIAGE en 2006 à Lyon. Année d'échange à l'Université de Toronto en 2004-2005. Organisateur des Journées Nationales MIAGE en 2004 à Lyon. Président de l'Association des Miagistes Lyonnais en 2003. Vice-Président Etudiant de l'Université Lyon 1 entre 2000 et 2002.

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7 réponses

  1. Thomas dit :

    Vaste sujet… Tout dépend de la définition qu’on donne au mot qualité. Pour revenir sur le dernier chapitre, en TI, on a tendance a distinguer la qualité ‘objective’ (nombre de bug, indicateurs de performance, stabilité de l’application, …) de la qualité ‘subjective’ (satisfaction des utilisateurs).
    Les outils existent pour ça, les projets dits « industrialisés » (reposant sur une démarche CMMi, intégration continue, …) optimisent le premier, les projets dits « AGILE » (scrum, xp, rad, …) se concentrent sur le second et correspondent bien à ce que tu cherches.
    Cela marche bien sûr mieux dans le monde du spécifique, que dans le monde du progiciel / ERP.

  2. maplanet dit :

    Je ne me pencherai pas sur la notion de qualité en TI… par contre en ce qui concerne l’alimentaire, je ne partage pas votre point de vue. En effet en agro-alimentaire, le terme qualité ne défini pas le côté gustatif (bon/ pas bon) mais doit plutôt être considéré comme l’assurance que vous n’avez pas de risques à consommer tel ou tel produit (intoxication alimentaire, morceau de métal, allergie, etc). En résumé (très rapide !), en agro, le « goût » est un élément pris en compte dans la notion de qualité mais n’est certainement pas prépondérant (un produit ayant un mauvais goût ne se vendrait pas !). Les processus que vous décrivez en agro sont d’avantage liés à de « l’assurance qualité », c’est à dire un produit propre à la consommation.
    Si vous rechercher des produits de bonne « qualité » gustative (voir nutritionnel), allez plutôt dans les commerces de proximité ou achetez directement auprès des producteurs.

  3. roland dit :

    @maplanet> « je ne partage pas votre point de vue » ; et pourtant on dit la meme chose : l’assurance qualite ne donne pas de garantie sur la bonne qualite gustative – tout au plus une garantie que le produit est sans danger et pas inmangeable !
    Mais peut-etre etait-ce une reaction au dernier paragraphe ? (« ca ne garantit rien du tout pour l’utilisateur final. »)
    Pour clarifier ca : je suis tout a fait convaincu de l’utilite de l’assurance qualite, surtout dans l’agroalimentaire – mais mon propos n’etait pas son inutilite, mais comment l’industrie s’est approprie le terme de qualite pour en faire une notion objective – ce qui est impossible a mon sens car la qualite est basee sur des criteres subjectifs – et ces efforts augmentent les couts de production -et donc le prix des produits en question.
    Et on peut s’interroger sur cette demarche car, comme tu le dis bien a la fin : pour trouver les « produits de bonne qualite gustative » (c’est d’ailleurs dommage qu’on ne puisse pas dire « de bonne qualite tout court »), on ne peut pas se baser sur l’assurance qualite, mais plutot sur une chaine de confiance entre le producteur et le consommateur, ou tous les maillons de la chaine sont des experts et selectionnent les produits en fonction de criteres subjectifs
    La question qui me restent, apres avoir lu ton commentaire, est donc : est-il possible de se baser uniquement la-dessus pour choisir un produit de qualite ? Ton commentaire me fait penser que non, car je risque d’avoir des bouts de metal dans mon pate de foie gras artisanal 😉
    byz++
    roland
    — edite par roland a 0h02

  4. Roland dit :

    Pour continuer la lecture, vous pouvez lire cet article concernant facebook qui a decide d aider les internautes a trouver du contenu grace aux conseils des precedents visiteurs :
    http://news.bbc.co.uk/2/hi/technology/8590306.stm

  5. Elodie dit :

    Il y a de bonnes définitions, des fautes d’ortographe mais surtout une énorme incompréhension pour toi entre assurance qualité et qualité. Entre les 2 il y a un fossé donc laisse tomber tes jugements de journaliste et fait autre chose de tes doigts!

  6. Roland dit :

    Merci Elodie pour ta contribution qui semble confirmer qu’en effet Assurance Qualite n’est pas synonyme de Qualite – nous sommes donc d’accord 😉
    N’hesite pas a te servir de tes doigts pour etayer ton propos – et accessoirement m’aider a comprendre mon erreur ?
    roland
    ps: desole pour les fautes d’orthographe
    – édité par Roland

  1. 22/01/2010

    […] j’aurai selectionné (histoire d’éviter les trolls). Une façon d’améliorer la qualité […]