English or not English? *

Tout le monde vous le dira : aujourd’hui, il faut (au minimum) parler l’anglais en plus de sa langue natale. Mais pour quoi faire ?


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Je ne suis pas sûr qu’ il y ait encore des entreprises internationales où il n’est pas nécessaire de parler anglais. En fait, je connais une entreprise présente à l’internationale donc la langue de travail est le français : Hermès. Mais j’imagine que même chez Hermès, il doit être nécessaire de parler anglais pour communiquer avec les clients à l’étranger.

Donc je ne connais pas d’entreprise internationale où l’anglais ne soit pas utilisé.

La « barrière de la langue »

La sélection par l’anglais, ça peut commencer dès le recrutement : certains postes sont clairement annoncés avec une composante anglophone, et j’ai pour ma part eu l’occasion d’être testé en anglais lors de mes entretiens d’embauches. Chez Sogeti Transiciel, l’un des deux recruteurs est passé à l’anglais sans prévenir lors de l’entretien, et nous avons parlé pendant quelques minutes. Chez France Télécom, c’était un test écrit, avec des exercices de grammaire et de vocabulaire type « TOEFL ».

Pour ces postes, au moins, vous êtes prévenu. Mais qu’en est-il des autres ? Ceux où l’anglais n’est pas demandé à l’embauche ?

Le « plafond de la langue »

Il faut se rendre à l’évidence : tôt ou tard, vous ne pourrez plus évoluer dans l’entreprise si vous ne parlez pas anglais. Ceci est vrai dans les grandes entreprises, et c’est sans doute vrai dans beaucoup de PME : combien d’entreprises informatiques françaises peuvent se permettre de n’avoir *aucun* client à l’international ?

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Suivant l’entreprise, ça prendra peut-être des années, mais à un moment donné vous atteindrez le « plafond » des postes ouverts aux non anglophones. Et à ce moment-là, vous serez bloqué, à moins de vous y mettre à ce moment-là ! L’expérience montre qu’apprendre une seconde langue devient plus difficile avec l’âge. Alors autant prendre de l’avance ! En plus, vos patrons vous favoriseront pour une promotion s’ils savent que vous parlez anglais ; au contraire, ça risque d’être un obstacle de ne parler que français.

L’anglais est partout

Dans tous les cas, et à tous les niveaux, l’anglais est présent dans les entreprises d’aujourd’hui :

  • les documents officiels doivent être en français : c’est la loi. Vous ne pouvez pas avoir un contrat de travail, ni des notes d’organisation rédigés en anglais, il y a eu légisprudence là-dessus. Mais pour tout le reste, la communication officielle de votre entreprise internationale sera toujours en anglais, et de temps en temps traduite dans les différentes langues nationales. Si vous ne parlez pas anglais, vous découvrirez rapidement que l’outil de traduction Google n’est pas parfait, vous serez à la ramasse pour comprendre la stratégie de votre boite…
  • les documents de travail : s’il y a des anglophones dans un groupe de travail, tous les documents seront en anglais. Et croyez-moi, personne ne perdra de temps à traduire des documents qui évoluent tout le temps.
  • la documentation technique : vous avez besoin d’aide sur une fonction java ? demandez à Google. Et vous augmenterez énormément vos chances de trouver une réponse si vous cherchez en anglais.
  • les relations avec les collègues : c’est dommage, la jolie suédoise (ou le bel irlandais, au choix) qui vous fait de l’oeil depuis le début de la réunion ne parle pas français. Vos chances sont réduites, alors que Sébastien (ou Sophie, au choix) parle très bien anglais et lui a déjà proposé d’aller boire un verre après la réunion. Dommage…
  • les conférences téléphoniques : aujourd’hui, je ne passe pas une semaine sans au moins une conférence téléphonique. Et c’est souvent 3 ou 4. Et quand il y a des anglais, des américains, des italiens et des danois au téléphones, je peux vous assurer que ce n’est pas le français qui est choisi pour parler !

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A ce jour, j’ai un patron qui est anglais (et qui ne parle pas français) et un client qui est français (et qui parle anglais, mais qui dira qu’il n’avait pas compris quand ça l’arrange). Du coup, pour tout verrouiller, j’envoie tous mes messages et j’écris tous mes documents en 2 langues. Si je ne faisais pas ça, je n’aurai jamais la certitude que tout le monde est d’accord sur les mêmes choses.

Evidemment, vous pouvez compter sur les formations. Mais la formation, ça coûte cher et ça prend du temps : pour que votre boite décide de vous en donner, il faut qu’elle se dise que ça lui coûte moins cher ET que ça ira plus vite de vous former en anglais, plutôt que de prendre quelqu’un d’autre qui parle déjà anglais. Et rien ne dit que vous aurez le temps d’aller en cours (c’est à dire : rien ne dit que votre patron aura envie que vous preniez le temps d’aller en cours !).

Et je ne parle même pas du jargon : regardez les titres du blog ! c’est plus « in » d’utiliser des mots anglais !) ; c’est énervant quand quelqu’un ne trouve plus ses mots français (conf call, baseline, cloud computing, overbooké, etc.) voire transforme des expressions française à la québecoise pour « matcher » les expressions anglaises : « ça f ait du sens », « je vais visiter nos bureaux de Zurich », etc.

Comment apprendre l’anglais ?

Honnêtement : à chacun sa méthode.

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Mais à la base, si vous n’avez pas envie, vous n’y arriverez pas. En ce qui me concerne, le déclic m’est venu lors d’un congrès étudiant à Rome : jusque là, j’allais en cours d’anglais, j’apprenais mes cours comme tout le monde, et j’essayais d’avoir un bonne note. L’anglais était une matière comme les autres. Et là, soudainement, j’ai réalisé que l’anglais, c’était une langue qui permettait de communiquer avec d’autres personnes, pour me faire comprendre et échanger des idées ! Et échanger des idées, moi, j’adore ça 😛

A partir de là, tout a changé, et je n’allais plus en cours d’anglais pour avoir une bonne note, mais pour réellement m’améliorer, car je ne voulais pas me sentir limiter par la fameuse « barrière de la langue ».

Au départ j’avais un niveau scolaire plutôt faible en anglais. Mais quand j’ai décidé de partir à l’étranger pour 1 an d’échange, et qu’il a fallu que je prépare le TOEFL, j’ai lu Harry Potter (c’est facile à lire !) et j’ai regardé Friends en VO (c’est plus marrant que la VF 🙂 ). Mais peut-être que pour vous c’est les paroles de chansons, ou la radio, ou les articles de journaux, ou les films (en VO sous-titré anglais, c’est mieux, sinon on peut pas s’empêcher de lire les sous-titres en français).

Ca paraît bateau, mais ça a marché ! Le plus difficile est de garder la motivation, et pour ça rien ne vaut un objectif (par exemple : un voyage à l’étranger).

L’écart culturel

Mais même si vous parlez bien l’anglais, il y aura toujours des choses que vous ne comprendrez pas, des références qui vous échappent, des approches qui vous désarçonnent.

Par exemple, le comportement en réunion des américains est radicalement différent de celui des français ! Imaginez que vous ayez une présentation de votre projet à faire à la direction, et vous savez qu’ils sont un peu coincés. A votre avis, quelle est la première chose à faire quand vous commencez votre présentation ? Aux Etats-Unis, la réponse est : une blague ! En France, je ne vous conseille pas d’essayer ; en général ça passe moyen. De la même manière, les français aiment bien qu’on leur présente les données brutes pour en tirer leurs propres conclusions, et n’hésitent par à argumenter avec le présentateur ; alors qu’aux States, vous avez plutôt intérêt à présenter uniquement des schémas synthétiques, et si vous commencez à remettre en cause les résultats présentés, ça passera pour une attaque frontale sur le présentateur qui ne sera pas comprise par les autres personnes.

Bref, pour vraiment apprendre la langue, il faut l’aimer un peu, pour avoir envie de comprendre pourquoi ces gens non seulement parlent une autre langue, mais ont une autre histoire et une autre approche que vous ! Et pour ça, le mieux, c’est d’aller y vivre un moment.

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La chance des étudiants

Et le plus simple pour passer plusieurs mois dans un pays étranger, c’est de le faire quand vous êtes étudiant, dans le cadre d’un programme d’échange :

  • vous validez à l’étranger votre diplôme français, donc ce n’est pas une année perdue
  • vous n’avez pas encore de boulot, donc rien à perdre
  • vous n’avez pas encore d’époux ni d’enfant, donc rien ne vous retient
  • vous avez plus d’aide pour le faire que dans tout autre pays au monde :
    • vous payez vos frais d’inscription en France, qui sont 10x inférieurs à ceux de l’université américaine dans laquelle vous irez
    • l’euro est fort, et donc le taux de change est en votre faveur (pourvu que ça dure !)
    • les boursiers ont des bourses spéciales pour partir ; les universités en donnent parfois ; l’Europe a le programme Erasmus ; et enfin plusieurs Régions donnent des bourses.

Qu’attendez-vous ?

En conclusion…

J’entends souvent dire qu’il faut protéger la langue française, qu’on est en train de se faire noyer par l’anglais, etc.

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C’est sans doute vrai, mais pour ma part, je pense qu’il faut l’accepter et vivre avec ! Regardez les finlandais : 5 millions d’habitants, presqu’aucun film doublé en finlandais (c’est pour ça qu’ils parlent si bien l’anglais !), et pourtant leur langue n’a toujours pas disparu, et Nokia est une des entreprises de haute technologie les plus connues au monde !

Alors mon conseil : soyez les Ambassadeurs de la France, pas ses défenseurs !

Le meilleur moyen de préserver le Français n’est pas de le défendre à tout prix, mais de lui donner de la valeur. Il aura de la valeur si d’autres personnes ont envie de mieux connaître la France et notre langue. Et pour leur donner envie, rien de mieux que de leur parler de notre histoire, de nos peuples, de nos régions, de nos terroirs, de nos spécialités, de nos vins, de nos fromages… tout ça, dans leur langue !

frenchman

Oui, on peut être chauvin et apprécier d’autres pays et leurs langues 🙂

Un dernier argument pour apprendre l’anglais : plus on sera nombreux à parler l’anglais, plus on a de chances que ça soit cette langue-là qui soit utilisée pour travailler dans le monde, et pas le mandarin ! Pensez-y 😉

Roland

* that is the question!

Roland

Actuellement IT Services Manager (France) au sein de la société Wolseley. Diplômé du Master MIAGE en 2006 à Lyon. Année d'échange à l'Université de Toronto en 2004-2005. Organisateur des Journées Nationales MIAGE en 2004 à Lyon. Président de l'Association des Miagistes Lyonnais en 2003. Vice-Président Etudiant de l'Université Lyon 1 entre 2000 et 2002.

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4 réponses

  1. C’est marrant, enfin marrant pas trop, mais lors d’un entretien pour un poste hier midi le recruteur c’est mis à me parler anglais sans prévenir, j’avoue que ça m’a un peu désarçonné (mon anglais n’est pas vraiment « fluent ») et j’ai souris, la surprise passé je lui ai demandé poliment de répéter la question (in english of course) et tout c’est bien passé durant les 5 minutes qu’a duré ce « switch » de « language ».

    C’est évident que parler anglais est un énorme plus et même un handicap si on ne le parle pas : personnellement j’ai eu mon déclic il y’a 1 an 1/2 (je suis long à la détente) lors d’une rencontre internationale de jeunes (oui un jamboree Scout, d’accord…) en Angleterre, 40 000 personnes de dizaine de nations différentes et une langue : devinez laquelle 🙂 Et puis deux mois après je me retrouvai au Cambodge où même avec une majorité de français on parlait anglais pour que les autres nous comprennent.
    Du coup je me suis retrouvé dans le même cas que ton illustration (très juste) d’Igor Aleshin : balèze en anglais technique mais c’est pas avec ça qu’on va parler au voisin de palier de l’hôtel/de la tente.

    Alors étudiant profitez pendant que vous êtes libre : vous n’avez rien à perdre (bien au contraire) !

  2. Curt dit :

    Mon experience de 5 ans de travail en France dans une industrie de pointe m’a appris que « ça passera pour une attaque frontale sur le présentateur qui ne sera pas comprise par les autres personnes » est vrai en France, et non pas ici en Amerique.

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